samedi 31 décembre 2016

La fleur rouge

Vsevolod Garchine
L'Arbre vengeur
EAN : 9791091504027

sorti le 10 juillet 2013
langue française
46 pages


Résumé : Les fous ont beaucoup à dire aux hommes qui les jugent et s'en débarrassent, impuissants. Celui qui débarque dans cet asile russe découvre que le Mal absolu a pris les atours de trois fleurs de pavots rouges et il n'aura de cesse, au péril d'une vie qu'il est prêt à sacrifier, de les arracher.

Mon avis : Dans cette nouvelle de 1885, et dès la première ligne, Garchine nous plonge dans la folie d'un homme, un sujet qu'il connaît bien en ayant été lui-même la victime.
Son écriture lyrique et précise, haletante, donne un attrait inquiétant à son texte sans qu'aucune des actions ne le justifie réellement, lui conférant ainsi une puissance incroyable qui captive le lecteur. 
Le fou déborde d'humanité, il est attachant dans ses questions existentielles, dans la destinée qu'il se crée pour donner un sens à sa présence en ce lieu. Il se voit comme un élu, l'homme qui doit sauver le monde du Mal absolu représenté par trois petites fleurs dans le jardin de l'hôpital. Mais sa mission, primordiale, est toujours entravée par les médecins, au cœur dur, qui apportent une certaine violence à ce texte. 
Ainsi, trois points de vue sont mis en valeur dans ces 50 pages : le regard du fou, émouvant, celui des médecins, froid et distant, et celui du narrateur, cynique, ce qui confère à cet hôpital une atmosphère étrange et inquiétante qui est d'autant plus visible que ce lieu contraste avec la beauté de ces trois fleurs qui exacerbent la folie du personnage.
Finalement, Garchine nous pousse à réfléchir sur la folie, l'isolement, la façon dont ces personnes sont perçues et traitées par la société.

Une oeuvre sombre et sensible.




"Son état d'esprit était un curieux mélange de jugements corrects et d'absurdités."
La fleur rouge                 

dimanche 18 décembre 2016

La tombe des lucioles

Akiyuki Nosaka
Editions Philippe Picquier
EAN : 9782809710564

sorti le 6 janvier 2015
langue française
144 pages


COUP DE CŒUR !

Résumé : Japon, été 1945. Après le bombardement de Kobe, Seita, un adolescent de quatorze ans et sa petite sœur de quatre, Setsuko, orphelins, vont s'installer chez leur tante à quelques dizaines de kilomètres de chez eux. Celle-ci leur fait comprendre qu'ils sont une gêne pour la famille et doivent mériter leur riz quotidien. Seita décide de partir avec sa petite sœur. Ils se réfugient dans une grotte en pleine campagne, mais bientôt la nourriture commence cruellement à manquer.

Mon avis : Ce livre m'a beaucoup surprise. D'abord, je ne savais pas qu'il y avait deux nouvelles (le fait qu'il y ait deux traducteurs aurait pourtant dû me mettre sur la voie...), et puis, je ne m'attendais pas du tout à une telle écriture ! Les phrases sont longues, certaines font la moitié d'une page, avec des digressions, des changements de narrateurs, et où le vulgaire côtoie le classique... Je l'ai trouvé plutôt dur à lire à cause de ça, mais j'en garde un très bon souvenir.
La nouvelle La tombe des lucioles, qui narre la vie de deux enfants pendant les bombardements américains, était très émouvante. Elle est à l'origine du film, aujourd'hui très connu, "Le tombeau des lucioles" mais le vocabulaire, très visuel, utilisé par Nosaka enlève le côté poétique du film, j'ai eu l'impression de lire une histoire totalement différente ! Le texte est très sombre, avec les lucioles pour seules lueurs, seul espoir, dans un Japon en guerre, très réaliste. Nosaka ayant perdu sa mère et sa sœur durant la guerre, connaître son passé me l'a rendue d'autant plus touchante que j'y voyait là une sorte de regret, une culpabilité d'avoir survécu sans les siens, dont il rend compte avec la mort de son alter-ego.
J'ai tout de même préféré la seconde nouvelle, Les Algues d'Amérique, car elle déborde de cynisme. La femme de Toshio, le personnage principal, invite chez eux un couple d'Américains qu'elle a rencontré pendant ses vacances à Hawaï et avec qui elle est restée en contact. Le lecteur va alors progresser dans un Japon schizophrène, perdu entre l'amour de sa patrie et l'admiration pour l'Occident, entre le passé et le présent. Cette nouvelle est provocante autant par sa vision des Etats-Unis que du Japon. Elle aussi prend son sens dans le contexte de la Seconde guerre mondiale, et est beaucoup moins axée sur les sentiments personnels, même si c'est par ce biais que Nosaka nous fait part de ce dilemme. On découvre plutôt une critique de la société japonaise qui se "vassalise" aux Etats-Unis, couplée de la rancœur de ceux ayant vécu la guerre et qui gardent une image de l'Américain arrogant et, surtout, ennemi. Malgré tout, on sent bien que l'objectif n'est pas de diaboliser les changements de mentalité et que Nosaka comprend même si il lui est difficile d'accepter.

Un même thème pour deux ressentis différents ; une lecture avec le cœur, et l'autre avec la tête.




"c'étaient des scintillements de lucioles juchées chacune au bout d'une feuille, il suffisait de tendre la main pour faire monter les petites lumières le long des doigts, "Regarde ! Essaie de la prendre !", il en fit tomber une sur la paume de Setsuko, mais elle ferma si fort son poing qu'elle l'écrasa"
La tombe des lucioles

vendredi 16 décembre 2016

Babylone

Yasmina Reza
Editions Flammarion
EAN : 9782081375994

sorti le 31 août 2016
langue française
220 pages


Résumé : "Tout le monde riait. Les Manoscrivi riaient. C'est l'image d'eux qui est restée. Jean-Lino, en chemise parme, avec ses nouvelles lunettes jaunes semi-rondes, debout derrière le canapé, empourpré par le champagne ou par l'excitation d'être en société, toutes dents exposées. Lydie, assise en dessous, jupe déployée de part et d'autre, visage penché vers la gauche et riant aux éclats. Riant sans doute du dernier rire de sa vie.
Un rire que je scrute à l'infini. Un rire sans malice, sans coquetterie, que j'entends encore résonner avec son fond bêta, un rire que rien ne menace, qui ne devine rien, ne sait rien. Nous ne sommes pas prévenus de l'irrémédiable."


Mon avis : Ce roman est assez dur à résumer, il semble se passer sur un laps de temps très court, mais avec beaucoup d'éléments différents. On suit Elizabeth Jauze, une femme de 62 ans qui vit un événement marquant à la suite d'une soirée qu'elle organisait chez elle, événement que je tairai pour ne rien dévoiler mais qui arrive très vite dans le livre.
L'intrigue en elle-même est crédible, mais manque d'originalité. Ce qui contrebalance ce point faible est l'écriture de Yasmina Reza, simple et plutôt agréable à lire, et même si cela me gênait au début pour me plonger dans l'histoire, je me suis vite habituée à la succession de phrases courtes et de passages plus longs. Cependant la structure du livre rend tout de même la compréhension assez complexe. Il n'y a pas de chapitres, peu de dialogues et beaucoup de digressions avec les souvenirs de la narratrice, ce qui fait qu'on a du mal à se repérer dans le temps. Malgré tout, ces choix de structure et d'écriture sont intéressants, c'est ce qui donne son originalité au texte, car ces changements de style permettent d'installer un certain rythme tout au long du récit, ce qui évite que le lecteur s'ennuie, et les nombreuses digressions font durer le suspense et apportent beaucoup de références et d'explications sur le comportement des personnages.
Ceux-ci ne sont pas nombreux, et seulement trois d'entre eux sont réellement décrits : la narratrice, Elizabeth Jauze, et ses voisins Jean-Lino et Lydie Manoscrivi. Je n'ai pas trouvé ces personnages attachants, bien que je pense que les deux premiers ne manquent pas de profondeur, et leur solitude, cette impression de perdre pied qu'ils ressentent, m'a touchée, ainsi que l'affection débordante qu'ils ont l'un pour l'autre. Quand à la dernière, je l'ai trouvée un peu exagérée dans ses traits mais je pense que c'est voulu ainsi, comme un moyen pour aider le lecteur à s'attacher aux deux autres personnages et à rentrer pleinement dans le roman.

Ce livre se lit facilement, l'intrigue est cohérente et on est impatient de connaître le fin mot de l'histoire. C'est divertissant, mais loin d'être un coup de cœur.





"Ces élans d'optimisme [...] qui nous font multiplier les choses pour les rendre aussitôt vaines. Les choses et nos efforts. Le mur devant lequel il se tient est gigantesque."
Babylone

dimanche 6 novembre 2016

Giphantie

Charles-François Tiphaigne de la Roche
Editions Marguerite Waknine
EAN : 9782916694474

sorti le 15 février 2013
langue française
160 pages


Résumé : Récit d'un voyage fantastique au long duquel s'enchaînent avec vivacité péripéties époustouflantes et réflexions diverses quant à la société des Lumières, ses mœurs, ses connaissances ; l'ensemble agrémenté de surprenants passages où se devinent les préfigurations de nombre d'inventions à venir.

Mon avis : Tiphaigne de la Roche, auteur du XVIIIème siècle, est fidèle à son époque, auteur oublié des Lumières, insatiable de curiosité. D'une écriture où se mêlent ironie et discours savants, il nous donne une leçon, leçon de vie et sur les choses, il nous pousse à la réflexion.
Son narrateur, naïf mais empreint de philosophie, est guidé vers une île inaccessible à l'homme, l'île des esprits, l'île des origines : Giphantie. Dans ce cadre merveilleux, le préfet de l'île lui fera la visite. Il découvrira son monde tel qu'il est perçu par les esprits, ainsi que plusieurs de leurs inventions qui ne sont pas sans nous rappeler les nôtres... Avant même Jules Vernes, Thiphaigne de la Roche est un précurseur de la science-fiction ; bien que très différentes de celles d'aujourd'hui, on reconnaît sans mal dans ses inventions le téléphone, la télévision ou la photographie.
Sous forme de conte philosophique, Tiphaigne remet l'homme à sa place, fait une critique acérée de l'humanité et des civilisations couplée d'une éloge de la Nature. Giphantie est merveilleuse de beauté, ce qui contraste avec la corruption, la décadence, le désir d'apparence plutôt que de vérité qui caractérise l'humain. Le narrateur, peut-être est-il aussi un peu l'auteur, observe sa patrie en écoutant les remarques de son guide qui ne sont pas flatteuses ; que ce soit par la religion ou par la politique, l'homme se refuse à penser, il s'évertue à faire les mauvais choix. Le bonheur est absent, la violence omniprésente.
Etant découpé en plusieurs chapitres très courts (entre deux et trois pages), ce livre se lit très rapidement. Néanmoins, on y trouve certaines longueurs et l'écriture ne le rend pas facile. Sa véritable qualité est cet enchaînement de réflexions philosophiques, ce qui en fait un livre dont l'accès est restreint. Cependant, les thèmes qu'il aborde sont intemporels et il est assez aberrant qu'en trois siècles les sociétés aient aussi peu changé dans leurs caractéristiques...

En bref, un livre impitoyable qui liste la stupidité humaine et nous pousse à réfléchir, aussi compliqué dans ses objets que dans son écriture.




"On dirait, en effet, que le genre humain fait tout ce qui dépend de lui pour rester bien au-dessous du degré où la nature veut l'élever ; et les plus heureuses des dispositions qu'elle lui donne pour le bien, il ne manque presque jamais de les tourner au mal."
Giphantie

mardi 1 novembre 2016

Les Passagers du Roissy-Express

François Maspero
Editions PointsEAN : 9782020631334

sorti le 14 janvier 2004
langue française
352 pages



Résumé : Un jour de printemps, au temps des cerises, François et Anaïk embarquent à Roissy, tête de la ligne B du RER, pour une croisière au long cours. Direction : la station terminus, Saint-Rémy-lès-Chevreuse. 38 gares, 50 kilomètres de rail, de la plaine de France aux vallées du Hurepoix. Elle prendra des photos. Il écrira.

Mon avisLes passagers du Roissy-Express est un récit de voyage. Son originalité vient du fait que, contrairement à ceux qu'on trouve en majorité, il ne nous amène pas à l'autre bout du monde, dans d'autres pays. Celui-ci nous fait découvrir les banlieues parisiennes, ces villes qu'on traverse tous les jours sans jamais les voir et les connaître.
Ce voyage est un voyage à contrainte : un mois pour découvrir les villes, les gens, sans jamais rentrer à Paris. Une station à la fois et sans enquête, seulement le regard de François et Anaïk sur ce qui les entoure.
C'est aussi une perle littéraire. François retranscrit les descriptions, l'Histoire de ces lieux, les témoignages, transmet les contacts qu'ils ont gardé avec les habitants après le voyage. En changeant de style selon les passages qu'il aborde. Le tout est entrecoupé d'extraits de livres, de chansons, de publicité, d'événements politiques internationaux et bien sûr des photos de la photographe Anaïk Frantz.
Parler des personnages, personnes plutôt dans ce cas, est plus compliqué. Puisque c'est François qui écrit, il parle peu de lui-même et c'est beaucoup plus axé sur leur découverte que sur eux. Par contre, le texte étant écrit tout de même à la troisième personne, c'est très déstabilisant quand on le commence.
Quant à leurs découvertes, elles laissent une impression de vide : on traverse des lieux désolés, sordides, on parle à des habitants qui ont perdu l'envie de se battre... C'est émouvant mais ça laisse un goût amer dans la bouche.

En bref, un texte très bien écrit, à la fois émouvant et instructif, plein d'humour mais qui retourne le cœur, nous laisse des frissons.





 "Difficulté de rendre compte de la vie. Trop de photos pour bien voir. Pas assez de temps pour tout voir."
Les passagers du Roissy-Express

mardi 25 octobre 2016

Tokyo Vice

Jake Adelstein
Editions Marchialy
EAN : 9791095582007

sorti le 4 février 2016
langue française
475 pages


COUP DE CŒUR !

Résumé : Quand Jake Adelstein intègre en 1993 le service Police-Justice du plus grand quotidien japonais, le Yomiuri Shinbun, il n'a que 24 ans et il est loin de maîtriser les codes de ce pays bien différent de son Missouri natal. A Tokyo, il couvre en étroite collaboration avec la police les affaires liées à la prostitution et au crime organisé. Pour cela,il n'hésite pas à s'enfoncer dans les quartiers rouges de la capitale, dans les entrailles du vice et de la décadence. Approché par les yakuzas, il devient leur interlocuteur favori tout en restant un informateur précieux pour la police. Une position dangereuse, inédite et ambivalente, aux frontières du crime, qui incite Jake Adelstein à entrer dans un jeu dont il ne maîtrise pas les règles.

Mon avis : J'aurais beaucoup trop de choses à dire sur ce livre, je vais donc essayer d'être concise et de ne pas vous gâcher la surprise qu'il peut vous amener. Avant toute chose, je tiens à souligner le travail remarquable fourni par les Editions Marchialy qui ont fait de ce livre, leur première publication, un véritable objet d'art que ce soit avec leur couverture underground ou leur mise en page originale et moderne.
Pour en venir au texte en lui-même, Jake Adelstein nous fait découvrir un côté du Japon plutôt sombre et méconnu. Avec son style dynamique, quelques jeux de mots et beaucoup d'humour, on embarque pour un pays et une culture totalement différents. On suit les difficultés de l'auteur, on apprend avec lui ces mœurs, ces hiérarchies, ces relations entre l'amitié et le purement professionnel. La richesse de ce livre est d'ailleurs, sans aucun doute, son côté humain ; les personnes que l'on nous présente sont hautes-en-couleur, parfois très attachantes comme c'est le cas pour la famille Sekiguchi. Même lors de ses enquêtes sur la prostitution, Jake Adelstein met en valeur les personnalités, les témoignages, plutôt que des faits durs. En lisant ce livre poignant, la difficulté est de toujours se rappeler que ce sont bien des événements réels et non pas un roman. 
Le contenu est lui aussi très intéressant ; on trouve, par de petites remarques pleines d'humour, le ressenti de l'auteur face à son statut de gaijin, d'étranger. On suit ses enquêtes sur le crime organisé, qui traitent du meurtre en série jusqu'au trafic d'êtres humains en passant par beaucoup d'autres crimes et délits. Il pointe grâce à cet ouvrage quelques uns des problèmes du Japon, que ce soit au niveau national ou international ; l'affaire principale qu'il relate concerne une organisation de yakuzas, le Yamaguchi-gumi, dont les conséquences affectent la hiérarchie interne de l'organisation, le Japon mais aussi plusieurs pays étrangers.

En bref : Tokyo Vice est un livre que l'on dévore du début à la fin. Entre le journalisme et le polar mafieux, il est très facile d'accès. Et la personnalité de son auteur ressort énormément dans tout ce texte ; l'écriture, les remarque, l'axe emprunté pour raconter les enquêtes. Je ne peux que le conseiller à quiconque s'intéresse un peu au Japon !




"Parfois, mieux vaut avoir de la chance que d'être bon"
Tokyo Vice

samedi 8 octobre 2016

The bone clocks

David Mitchell
Editions Sceptres
EAN : 9780340921623

sorti le 18 juin 2015
langue anglaise
626 pages



Résumé : The bone clocks conte la vie de Holly Sykes, une vie qui peut paraître ordinaire, mais ponctuée d'éclairs de précognition et de visites de personnes étranges semblant provenir de brèches dans les lois de la réalité. Car Holly Sykes est également un acteur involontaire dans une sanglante querelle jouée dans l'ombre et dans les marges de notre monde, et elle peut s'avérer être son arme décisive.



Mon avis : Le livre est divisé en 6 parties, chacune racontée par un narrateur différent mais qui ont pour dénominateur commun de faire découvrir des passages de la vie de Holly. Tout d'abord, j'avais du mal à en voir l'utilité, mais finalement je me suis rendue compte que tous les personnages apportent quelque chose d'important à l'histoire et le changement de point de vue installe un certain suspense. De même, la compréhension de l'aspect fantastique, essentiellement tourné autour de la mort, évolue tout au long du roman, l'enjeu n'est vraiment compréhensible que dans la cinquième partie. Absolument pas prévisible ou cliché, ce scénario est une petite merveille.

De même pour les personnages, en particulier les narrateurs, on ressent l'effet que Holly a eu sur leur vie ; d'abord antipathiques, présentés par leurs défauts, on s'attache à eux progressivement, ou l'inverse... Et les personnages qui peuvent paraître les plus insignifiants se révèlent en fait être les plus importants. Par contre, le style de David Mitchell est assez dur à suivre, l'auteur nous balade dans l'espace et le temps, et le fait que ça soit en anglais ne m'a pas forcément aidée (ce livre devrait cependant bientôt sortir en France), ce qui n'empêche pas que The bone clocks soit un livre marquant, avec des réflexions sur notre monde et notre façon d'agir et que David Mitchell mérite son statut d'écrivain talentueux et original.

En bref, une histoire compliquée à expliquer mais fascinante et originale.





"You only value something if you know it'll end."
                                                The bone clocks

En route pour la gloire

Robert Heinlein
Folio SF
EAN : 9782070320547

sorti le 18 mai 2006
langue française
457 pages


Résumé : Je n'étais pas très chaud pour partir en colonie de vacances dans le Sud-Est asiatique, mais on ne m'avait pas donné le choix. Enfin, à mon retour, j'avais une belle cicatrice toute neuve sur la figure et un billet de Sweepstake gagnant dans la poche grâce auquel j'ai rencontré la plus belle sorcière des Vingt Univers. C'est là que mes ennuis ont commencé : je me suis retrouvé dans un monde parallèle, à pourchasser des rats gros comme des loups, des dragons cracheurs de feu (évidemment), et même un Ogre, tout en essayant d'échapper aux Fantômes à Longues Cornes et autres Écumeurs des Eaux Glacées. Sans compter Celui-Qui-N'a-Jamais-Vu-Le-Jour et Celui-Qui-Dévore-les-Âmes. Et tout ça pour récupérer un Oeuf de Phénix... 
Vous allez dire que je ne suis jamais content, mais vous ne croyez pas qu'il y a de quoi vous faire regretter votre bonne vieille Terre, Sud-Est asiatique ou pas ? Et encore, je ne vous raconte pas tout !

Mon avis : Comme le laisse deviner le résumé, l'histoire ce passe dans des lieux enchanteurs, et suit un scénario de fantasy classique empli de créatures fantastiques. Cependant Heinlein explique tous ces codes grâce à la science, ce qui fait d'En route pour la Gloire un livre pour le moins original et intéressant.
Le récit est rapporté à travers les yeux du personnage principal, Oscar, l'écriture, assez ironique par moment, est très plaisante même si j'ai trouvé quelques passages un peu lourds. Malgré tout, j'ai eu du mal pendant la grande majorité du livre avec les deux personnages les plus importants, par leurs personnalités et leurs relations ; le fait qu'Oscar suive les ordres sans poser de questions (une image du militaire peut-être ? ), imagine des stratégies sans même savoir le "pourquoi" de sa quête m'a beaucoup dérangé. Il en va de même pour le personnage féminin, on voit Star par le regard d'Oscar, sexualisée au plus haut point et qui semble de plus en plus soumise tandis que l'on avance dans le récit. Ces éléments, ainsi que les premiers chapitres et la citation de début de livre, me font penser qu'en fait Heinlein est désabusé sur la société à laquelle il appartient et qu'il se sert de son livre pour en faire la critique, néanmoins sa vision de la France, pays qu'il a pourtant l'air d'apprécier, est remplie des clichés anti-français typique des États-Unis... Je dirais donc que ce livre m'a surtout troublée, que je l'ai parcouru sans jamais être sûre de vraiment comprendre ce que voulait transmettre l'auteur.
Toutefois, le concept m'ayant beaucoup attiré et la narration étant plutôt agréable, j'ai lu ce livre très vite. Et les derniers chapitres dans lesquels Oscar fait son introspection m'ont un peu réconciliée avec les personnages, le narrateur ayant grandi et, à l'aide de Rufo (un personnage que j'ai en somme bien aimé), ayant changé de point de vue sur ce qui l'entoure (la société comme ses proches).

En bref, un style agréable et un concept intéressant mais un manque de clarté et de légèreté dans les critiques.




"Les héros ne sont pas censés parler,c'est évident, puisque, chaque fois que j'ouvrais la bouche, on me fourrait quelque chose dedans."
En route pour la gloire

The Buried Giant

Kazuo Ishiguro
Faber&Faber
EAN : 9780571315079

sorti le 28 janvier 2016
langue anglaise
362 pages


Résumé : Axl et Beatrice vivent un amour constant qui a résisté aux années. Ils décident de faire un voyage pour rejoindre leur fils, parti depuis longtemps. De nombreux obstacles se dressent sur leur chemin, parfois étranges, parfois terrifiants, et mettent leur amour à l'épreuve. Leur parcours est une métaphore de nos vies à tous.

Mon avis : The Buried Giant fait partie de ces livres envoûtants, qu'on est incapable de fermer une fois qu'on l'a commencé et qui reste ancré dans nos têtes pendant longtemps. Par son univers poétique, empli de créatures merveilleuses, Kazuo Ishiguro nous fait réfléchir ; doit-on sortir de cette brume qui nous vole nos souvenirs ? Ce qu'on risque de découvrir de notre passé ne serait-il pas trop lourd à supporter ? Et en plus des métaphores, cette épaisse brume, présente tout au long du livre permet de donner une atmosphère à la fois pesante et confuse, qui se marie très bien avec l'Angleterre de légendes du temps arthurien.
Le parcours de notre vieux couple les mènera à se redécouvrir eux-même ainsi qu'à apprendre grâce à leurs rencontres des thèmes bien humains ; la confiance et la haine, la vengeance et la justice... Bien que je ne sois pas une grande amoureuse de romance, leur histoire m'a touchée par la tendresse débordante que l'on ressent entre eux.

En bref, poétique, envoûtant, "The Buried Giant" est un texte marquant, débordant de sensualité, de respect, de pudeur, le tout dans un univers de légendes inoubliable.





"Promise to keep what you feel for me this moment always in your heart, no matter what you see once the mist's gone."
The Buried Giant

dimanche 2 octobre 2016

Le Citron

Kajii Motojirô
Editions Philippe Picquier
EAN : 9782809709940

sorti le 7 mars 2014
langue française
125 pages


COUP DE CŒUR !

Résumé : "Pour tout dire, j'aime les citrons. J'aime leur couleur pure, comme celle de la peinture." Il y a une connivence immédiate entre Kajii et les choses. Regarder est pour lui "la seule manière vivante de vivre". Caresses, Sous les cerisiers, Le Citron... : l'écriture est d'abord sensorielle et la notation des sensations les plus fines, des moindres scintillements des objets animés et contemplés, nous convie à de nouvelles correspondances, à un rêverie dispensatrice d'émotion et de réconfort. Savon, crayons, bruit d'eau dans la forêt, grenouilles ou citron, les traces minuscules de la vie quotidienne révèlent leur beauté, leur monde secret à celui qui, les regardant de façon désintéressée, les nomme pour elles-même.

Mon avis : Pour bien comprendre ce recueil de nouvelles qu'est Le Citron, il est indispensable d'avoir quelques informations sur son auteur. Kajii Motojirô est né en 1901 et est atteint de tuberculose en 1917, la maladie, dont il mourra en 1932, va influencer sa vision du monde et de la vie. Ces aspects se retrouvent dans son recueil.
Composé de huit nouvelles, de longueurs inégales, l'originalité de ce petit livre réside dans cette vision de la vie à laquelle il nous invite. D'une écriture poétique, très axée sur les sens, Kajii nous emporte dans les corps de malades, se débattant entre des périodes lugubres d'ennui et de dépression et des instants de bonheur inattendus. Le livre ne contient pas vraiment d'action, il met en avant les sentiments, les sensations, grâce à des objets du quotidien et un style splendide, qui me rappelle par moment celui de Baudelaire. Le lecteur se retrouve dans une atmosphère de bulle, les sens exacerbés, à ressentir toutes ces émotions provoquées par la maladie, avec une intensité et une poésie que seul Kajii Motojirô pouvait nous offrir. Une histoire de partage et d'émotions.

En bref, un livre à vivre plutôt qu'à lire.




"Sous les cerisiers sont enterrés des cadavres ! Il faut s'en persuader. Sinon, n'est-il pas incroyable que les cerisiers fleurissent si splendidement ?"
Le Citron

samedi 24 septembre 2016

Exercices de style

Raymond Queneau
Editions Gallimard

sorti en 1979
langue française
160 pages



Résumé : Le narrateur rencontre, dans un autobus, un jeune homme au long cou, coiffé d'un chapeau orné d'une tresse au lieu de ruban. Le jeune homme échange quelques mots assez vifs avec un autre voyageur, puis va s'asseoir à une place devenue libre. Un peu plus tard, le narrateur rencontre le même jeune homme en grande conversation avec un ami qui lui conseille de faire remonter le bouton supérieur de son pardessus. Cette brève histoire est racontée quatre-vingt-dix-neuf fois, de quatre-vingt-dix-neuf manières différentes.


Mon avis : Un autobus bondé, un homme au physique et à l'accoutrement ridicule, une dispute puis une réapparition dûe au hasard... en somme, une histoire pour le moins banale. Cependant, Raymond Queneau nous prouve avec ce petit bijou littéraire qu'un scénario ne suffit pas à faire un bon livre. Grâce à ces nombreuses variations, je me suis rendue compte à quel point le style employé dans un texte compte ; il donne du sens, une certaine atmosphère, il va influencer nos impressions...
Co-fondateur de l'Oulipo, association qui réfléchit à la notion de "contrainte" et encourage ainsi la créativité, on retrouve dans cet essai de Raymond Queneau cet aspect, qui le rend assez étrange par moment. Certaines figures de styles sont exagérées, absurdes, d'autres rendent le texte illisible, le tout est un petit ouvrage curieux, marrant, que j'ai beaucoup apprécié et dont je ne me suis pas lassée ne serait-ce qu'une seconde (et pourtant, c'est bien la chose à craindre avec un essai de ce genre !) : de nombreuses figures de styles jouant sur les mots, déchiffrer ces textes m'a beaucoup amusée !

En bref, un énorme travail littéraire, des découvertes à chaque page, un livre audacieux et qui permet au lecteur de se rendre compte de toute la richesse de la langue française.

dimanche 18 septembre 2016

Les pêchers

Claire Castillon
Editions de l'Olivier
EAN : 9782823607901

sorti le 3 septembre 2015
langue française
208 pages


Résumé : Tamara est prisonnière. De son mari, Claude, qui veut faire d'elle une épouse modèle. D'Esther, la fille de Claude qui la surveille. Et de son amour perdu, à qui elle ne peut s'empêcher de rêver. La liberté lui fait peur, la captivité lui pèse. Elle ne peut ni rester ni partir.

Aimée, la mère d'Esther, semble parfaitement adaptée au monde tel qu'il va. Mais cette material girl cache une vraie fragilité. Et puis, il y a Esther... Adolescente, poète, espionne, innocente. Amoureuse. Son regard radiographie les adultes, ces gens étranges, incapables de voir la violence en eux.

Si c'était elle, la véritable héroïne de cette histoire ?

Elle ferait, alors, sans le moindre doute, une excellente victime expiatoire.


Mon avis : Ce roman se découpe en trois parties, dans lesquels trois femmes, liées, nous livrent leurs pensées intimes. On suit dans les deux premières parties Tamara puis Aimée, qui se débattent, à la recherche de leur liberté, à la recherche de l'amour. Ces femmes étant liées, j'ai beaucoup apprécié de connaître la suite de leur histoire, racontée par une narratrice différente, avec un regard différent sur cette situation.
La plume de Claire Castillon est acide, crue, déstabilisante. Elle nous plonge au cœur de ce tourbillon d'émotions, au milieu de la folie, de la rage, de la solitude... Cependant, si je me suis vite habituée à la plume de l'auteur, son style "parlé" m'a beaucoup dérangé au début. Elle dépeint un sexe faible, perdu mais luttant toujours. La guerre des sexes n'est pas un sujet qui m'intéresse énormément, mais la façon dont ce thème est traité dans Les pêchers m'a conquise grâce à ce regard totalement subjectif, à ce trop plein de sensibilité. 
La dernière partie concerne Esther, petite fille que l'on découvre par les regards de celles qui l'ont élevée. Mais lorsqu'elle raconte elle-même ses pensées, j'ai eu l'impression d'avoir un autre personnage sous les yeux. Abandonnée, à la recherche d'attention, elle devient le réceptacle des angoisses des adultes, de leur violence. Cette partie m'a beaucoup émue, mais aussi énormément dérangée justement à cause de toute la violence que cette enfant subit, tout en restant muette.

En bref, un texte bouleversant, acerbe, qui ne laisse pas indifférent.




"J'ai envie de rigoler, je me retiens, je sens la lumière au bout du couloir, c'est l'appel de la liberté, la porte qui s'ouvre sur un vent froid."
Les pêchers

samedi 27 août 2016

Neuroland

Sébastien Bohler
Editions Robert Laffont
EAN : 9782221144756

sorti le 19 mars 2015
langue française
615 pages


Résumé : La plus efficace des tortures est indolore.

Châtelet, gare de Lyon, Champs-Elysées. Trois attentats au cœur de Paris éventrent la capitale. Bilan : 53 morts.
Quelques heures plus tôt, le cerveau des attentats, un jeune djihadiste formé en Afghanistan, a été arrêté par la police. Protégé par le droit français, il s'est muré dans le silence. Pourquoi n'a-t-on pas su le faire parler ?
Saclay, région parisienne. Neuroland est un centre de recherches, le plus performant d'Europe. Deux jeunes chercheurs y travaillent à un projet révolutionnaire : un scanner superpuissant permettant de décoder les activités du cerveau.
Demain, on pourra lire dans les pensées.
Plus que jamais, celui qui possédera la connaissance possédera le pouvoir.

Mon avis : Ce thriller traite d'un débat du moment (bien qu'il ait été écrit antérieurement aux attentats) ; jusqu'où le gouvernement peut-il aller au nom de la sécurité ? Si le thème principal du livre est bien celui-ci, le sujet du terrorisme ne sert que d'excuse pour poser les bases de l'intrigue.
J'ai beaucoup aimé ce livre, le scénario mélange principalement sciences "dures", politique et violence tout en restant cohérent. Bien que je ne m'y connaisse absolument pas en sciences, les parties sur la neurologie m'ont beaucoup intéressée. Bohler est spécialiste en neurosciences avant d'être écrivain, mais ses explications restent assez claires en général ce qui rend la lecture agréable. Et ce parti d'utiliser la science comme un outil politique rappelle que beaucoup d'armes ont été créées par des scientifiques et qu'il est important d'avoir conscience des risques de certaines découvertes...
On suit dans ce roman plusieurs personnages qu'il serait possible de décrire comme "un psychopathe et ses victimes". De ce point de vue aussi, le roman m'a beaucoup plu ; d'un côté, un homme prêt à tout, charismatique et totalement abject et de l'autre des personnages ayant eu le malheur de lui déplaire, conscients ou pas de leurs situations, et qui depuis se débattent pour rompre les chaînes du destin qu'il leur a forgé. La plupart des personnages m'ont touchée, que ce soit par leurs qualités ou leurs défauts, je regrette seulement que l'on n'ait pas plus d'informations sur l'enfance du psychopathe en question.

En bref, un livre qui pousse à la réflexion, cohérent. Le début est un peu long, mais en s'accrochant on le dévore par la suite.




"-Si cette hypothèse est vérifiée, les conséquences peuvent être extrêmement graves. Il nous faut des preuves. Ces preuves,Milton, c'est vous qui allez les trouver."
                         Neuroland

lundi 15 août 2016

Chants du cauchemar et de la nuit

Thomas Ligotti
Dystopia Workshop
EAN : 9791091146135

sorti le 20 octobre 2014
langue française
241 pages


Résumé : Ce recueil regroupe onze nouvelles de Thomas Ligotti. Son style, mélangeant horreur et fantastique, se rapproche de ceux de Poe et de Lovecraft qui l'ont beaucoup inspiré. Bien que très célèbre dans les pays anglo-saxons, il aura fallu attendre 2014 pour qu'un premier recueil de ses nouvelles sorte en France.

Mon avis : Malgré des thèmes similaires, ces onze nouvelles sont très différentes les unes des autres ; on trouve tous les points de vues narratifs (externes, omniscients, internes), l'épistolaire côtoie le récit ainsi que bien d'autres genres. Je trouve cette diversité de textes très intéressante car elle offre un rapport complètement différent au lecteur pour chacune des nouvelles et qu'elle permet en plus d'avoir une vision globale du travail de Thomas Ligotti.
En ce qui concerne l'écriture de Thomas Ligotti, elle est très détaillée, tout en restant raffinée, avec beaucoup de descriptions relatives aux sens, cependant elle n'est pas aisée. Je pense que c'est cette combinaison d'éléments qui réussit à créer une certaine atmosphère tout au long du livre, que ça soit un malaise pendant quelques unes des nouvelles ou une impression de sortie brutale d'un cocon protecteur qui nous berçait jusque là de douces illusions. Cependant, malgré toute la richesse narrative et les idées originales de Thomas Ligotti, j'ai trouvé la fin de certaines nouvelles décevantes, avec une impression de manque.

En bref, onze nouvelles choquantes, grâce à une plume redoutable par son originalité et sa technique et une philosophie à la fois réaliste et pessimiste dans laquelle la vie est inutile et dénuée de sens.





"Il avait pourtant, dans certains livres, découvert des passages qui se rapprochaient de cet idéal, suggérant au lecteur que les pages qu'il avait sous les yeux allaient lui proposer une vision venue du gouffre et jeter une lueur hésitante sur de lugubres hallucinations."
Vastarien

lundi 18 juillet 2016

Zen

Maxence Fermine
Editions Michel Lafon
EAN : 9782749926971

sorti le 15 octobre 2015
langue française
134 pages


Résumé : "Chaque jour, de l'aube au crépuscule, Maître Kuro pratique l'art subtil de la calligraphie.
Pendant de longues heures, dans un recueillement proche de la plénitude, il reste agenouillé devant un rouleau de papier de riz et le recouvre d'encre noire.
Peu lui importe le vaste monde et ce qui le régit depuis des siècles. Il vit concentré sur son labeur et sur la direction, la finesse du trait qu'il dessine à main levée.
Avec verticalité, harmonie, simplicité et élégance.
Ainsi va la vie, tranquille et apaisante, de Maître Kuro."

Jusqu'au jour où...

Mon avis : Verticalité, harmonie, simplicité et élégance. Ces mots décrivent à merveille ce roman court. 
Maxence Fermine raconte le zen avec une écriture fraîche et épurée, les passages "explicatifs" (qui peuvent aussi bien être romancés tels que le quotidien de Maître Kuro qu'être plus "scolaires") dénotent une recherche sérieuse sur son sujet, même si certains de ces passages coupent le roman et installent une certaine distance avec les personnages. L'intrigue se base sur la relation entre Maître Kuro et sa disciple Yuna et avance tranquillement. Tout dans ce livre fait référence au zen. Les deux personnages forment le yin et le yang, et ce symbole est accentué par la fin du livre, simple et qui pourtant ressemble plus à un commencement dans le dénouement. 
Finalement, ce livre m'a fait voyagé au Japon, j'ai ressenti l'essence de cette philosophie, célèbre et pourtant méconnue. En le lisant, j'ai voulu en savourer chaque page, chaque mot...

En bref, un roman court, doux, apaisant, dont l'écriture épurée nous porte, nous fait ressentir la beauté de l'instant présent.




"La musique la plus difficile à créer, mais certainement la plus belle, est celle du silence."
Zen                 

dimanche 3 juillet 2016

Les pierres du rêve

Laurent Whale
Editions Multivers

sorti le 1 janvier 2016
langue française
ebook


Résumé« Les apparences sont souvent trompeuses, c’est une des premières règles que j’ai apprises. Alors, lorsqu’une blonde éplorée, carrossée comme un intercepteur buréen, vient vous demander assistance, vous subodorez une sacrée galère ! »

Dans ce monde où la nostalgie se meurt, la réalité n’est-elle que faux-semblants ?

Une vérité peut en cacher une autre. Les mondes parallèles se croisent et ne se ressemblent pas forcément. Nelson y plonge. Enquête. S’y noie. Y revit. Dans ce carrousel de mort, les noms tourbillonnent ; mais que sont les noms, sinon des étiquettes posées sur du vent ?
Depuis les colonies spatiales jusqu’aux cavernes de Bura-Pela, en passant par les bas-fonds de New Angeles, sa balade tragique tourne au vinaigre. Une course folle pour la vérité. Une course pour la vie. Et pourquoi vivre, si l’on ne rêve pas ?
Entre humour grinçant et règlements de comptes, Nelson promène sa nonchalance d’un autre âge à la face de ses contemporains excédés. Il y a de l’acide dans son scotch. Et ça, ça le met vraiment de mauvais poil, Nelson.

Mon avis : J'attendais beaucoup de ce livre, et je n'ai pas été déçue !
Au début, le style m'a beaucoup rappelé celui de San Antonio ; on suit les péripéties d'un narrateur-détective ressemblant à un adolescent libidineux. D'accord, dit ainsi, ça ne donne pas vraiment envie de le lire ! Pourtant le style familier, franc-parler du narrateur est "vivant", le récit est rythmé, avec beaucoup de métaphores (pas toujours poétiques) et de références, je l'ai personnellement trouvé très plaisant, relaxant. Le récit étant à la première personne, le lecteur évolue en même temps que Nelson, apprend à découvrir le vrai caractère de ce personnage, pas si dur que ça, et finalement on se retrouve plongé dans ses aventures, sans voir le temps passer... 
Et puis, savoir rythmer son histoire n'est pas le seul mérite de Laurent Whale : sous couvert d'une histoire principale placée sous le signe de l'humour, il traite aussi de sujets tels que la domination raciale, la dictature ou la différence, tout en subtilité, grâce à un univers de science-fiction.

En bref, un voyage à travers le temps et l'espace, plein de rebondissements, très bien ficelé, le tout avec un soupçon de philosophie... 




"Les pensées ne sont pas faites de mots, mais d'images associées à des émotions."

Les pierres du rêve      

dimanche 26 juin 2016

Dojoji et autres nouvelles

Yukio Mishima
Folio
EAN : 9782070422104

sorti le 2 janvier 2002
langue française
127 pages


Résumé : De l'univers des geishas aux rites sacrificiels des samouraïs, de la cérémonie du thé à la boutique d'un antiquaire, Mishima explore toutes les facettes d'un Japon mythique, entre légende et tradition. D'une nouvelle à l'autre, les situations tendrement ironiques côtoient les drames les plus tragiques : que ce soit la jolie danseuse qui remet du rouge à lèvres après avoir renoncé à se défigurer avec de l'acide en souvenir de son amant, Masako, désespérée, qui voit son rêve le plus cher lui échapper, ou l'épouse qui se saisit du poignard avec lequel son mari vient de se transpercer la gorge...
Quelques textes étonnants pour découvrir toute la diversité et l'originalité du grand écrivain japonais.

Mon avis : Yukio Mishima nous offre son point de vue sur le Japon de son époque. On retrouve dans ses nouvelles et sa pièce de théâtre, Dojoji, des valeurs japonaises traditionnelles, menacées dans ce Japon moderne (ces textes ont été publiés au Japon dans les années 1950-60). Mishima apporte à ses lecteurs l'étiquette et l'éthique de l'honneur comme les valeurs les plus importantes qu'il soit, cependant ses personnages, ainsi que leurs superstitions et leurs principes sévères, semblent appartenir à un passé révolu. La curiosité nous pousse à lire la suite, certains passages sont touchants, même marquants, cependant l'écriture de Mishima, pourtant subtile et poétique, amplifie la distanciation que l'on peut ressentir face à ce Japon, déjà radicalement différent de ce que nous connaissons en Occident.

En bref, des histoires étonnantes qui se lisent vite mais sans vraiment nous faire vibrer. Des textes qui nous font ressentir l'idéal de son auteur et découvrir un Japon pas si lointain mais dont le lecteur se sent exclu...




"Je m'étais rendu compte que même une abominable douleur - telle que je l'avais subie - jalousie, colère, inquiétude - ne suffisait pas à changer un visage humain."
Dojoji                     

lundi 20 juin 2016

Alice's Adventures in Wonderland & Through the Looking-Glass

Lewis Caroll
Wordsworth Editions
EAN : 9781853260025

sorti en 2011
langue anglaise
288 pages


Résumé : Alice s'ennuie auprès de sa sœur qui lit un livre ("sans images, ni dialogues") tandis qu'elle ne fait rien. "À quoi bon un livre sans images, ni dialogues ?", se demande Alice. Mais voilà qu'un lapin blanc aux yeux roses vêtu d'une redingote avec une montre à gousset à y ranger passe près d'elle en courant. Cela ne l'étonne pas le moins du monde. Pourtant, lorsqu'elle le voit sortir une montre de sa poche et s'écrier : « Je suis en retard ! En retard ! En retard ! », elle se dit que décidément ce lapin a quelque chose de spécial. En entrant derrière lui dans son terrier, elle fait une chute presque interminable qui l'emmène dans un monde aux antipodes du sien. Elle va rencontrer une galerie de personnages retors et se trouver confrontée au paradoxe, à l'absurde et au bizarre

Mon avis : Ce texte est un classique, tout le monde (même ceux n'ayant pas lu le livre) connaît le Pays des merveilles et ses personnages loufoques. Alice est un personnage attachant, qu'on suit avec plaisir dans ses découvertes, ses questionnements ; on se reconnaît un peu dans cette petite fille curieuse, on en oublie qu'elle n'est qu'un personnage tant les traits de son caractère sont "vrais". L'univers dans lequel Lewis Caroll nous plonge est complètement décalé, et le lecteur découvre à tâtons les multiples facettes de ce lieu à la fois merveilleux et inquiétant, d'autant plus que l'histoire, à l'instar du Pays des merveilles, est totalement décousue et échappe aux lois naturelles. Si ce conte complètement saugrenu a autant d'impact, c'est que Lewis Caroll a une plume hors du commun. Une écriture à la portée de tous (même en anglais), des parenthèses qui font sourire, des tonnes de références, de jeux de mots et un côté philosophique loin d'être déplaisant nous offrent une superbe critique de la société victorienne.

En bref, un livre à lire et à relire, pour la beauté de ces mondes imaginaires, de ces mots, de la rigueur de cet auteur.








"We're all mad here !"

Alice's Adventures in Wonderland


"Sometimes I've believed as many as six impossible things before breakfast." 
Through the Looking-Glass

lundi 13 juin 2016

Fragment d'histoire future

Gabriel Tarde
éditions Marguerite Waknine
EAN : 9782916694870

sorti le 1er novembre 2014
langue française
87 pages




Résumé : Quand, au XXVème siècle, l'humanité est arrivée à une espèce de paroxysme de progrès matériel et de médiocrité spirituelle, une catastrophe se produit : l'extinction du soleil qui force la population à se replier sous terre pour profiter de sa chaleur centrale. Il en résulte l'émergence d'une nouvelle société, toute spirituelle, libérée des contraintes matérielles et biologiques.

Mon avis : Cette nouvelle d'anticipation est très originale ; elle ne contient aucun personnage principal, le narrateur se contente de décrire le monde dans lequel il vit, le comparant à celui qui précédait la catastrophe. Un texte composé essentiellement de descriptions peut être assez déroutant, et le côté philosophique omniprésent dans le livre peut en rebuter plus d'un. Cependant, le style d'écriture de Gabriel Tarde, à la fois poétique et scientifique, est compréhensible et m'a personnellement emportée. Je ne pense pas que j'apprécierais de vivre dans une telle société, mais ce texte a le mérite de nous faire réfléchir sur beaucoup de points (arts, sciences, relations sociales...) ; bien que la nouvelle ait été écrite en 1876 et que le monde précédant la catastrophe paraisse "faible" au niveau technologique, cette société ne semble pas si éloignée de la nôtre.

En bref, ce texte m'a beaucoup plu ; facile à lire, intéressant, original, il est en plus très court ! Le seul problème que j'y trouve concerne la maison d'édition ; bien que je puisse comprendre le choix des cahiers pour la publication, et que cette originalité m'ait attirée vers ce livre, cela rend la lecture très compliquée avec des pages qui bougent sans cesse...


"Tout ce qui brille n'est pas or ; ces constellations splendides, qui essaient de nous éblouir, ce sont elles qui sont relativement stériles."
Fragment d'histoire future